La prière de Kol Nidré – כל נדרי

Définition

Kol Nidré (« Tous les vœux ») est une prière solennelle d’annulation publique des vœux, récitée à l’ouverture de l’office du soir de Yom Kippour.
Elle est proclamée trois fois par le ‘hazan, en présence de l’assemblée, et ouvre l’un des moments les plus émouvants de toute la liturgie juive.

Origines et controverses

• Déjà à l’époque des Guéonim (VIIᵉ–XIᵉ s.), la récitation de Kol Nidré suscita de vives oppositions. Certains craignaient une mauvaise interprétation : qu’il s’agisse d’une annulation générale et automatique de tous les engagements.

• Malgré cela, la coutume s’imposa dans toutes les communautés, portée par la force de son mélos liturgique, devenu emblématique.

• D’éminentes autorités médiévales tentèrent de la limiter, mais elle resta profondément enracinée dans la tradition.

👉 Il est important de noter que Kol Nidré n’efface pas rétroactivement les vœux déjà pris : il s’agit d’une déclaration préparatoire concernant les vœux que l’on pourrait faire sans y prêter attention (Rosh, Nedarim 23b).

Une théorie réfutée

Une légende tenace affirme que Kol Nidré aurait été créé en Espagne, lors des persécutions et conversions forcées par les Wisigoths ou les Rois catholiques.
Cette théorie est historiquement fausse :

• le texte est attesté dès l’époque des Guéonim, bien avant ces événements,

• et il fut adopté par l’ensemble des communautés juives, preuve d’une origine bien plus ancienne.

Dans les sources juives

La Torah

La Torah met sévèrement en garde contre la légèreté des vœux (Nedarim).

« Lorsque tu feras un vœu à Hachem ton Dieu, tu ne tarderas pas à l’accomplir… »
(Devarim 23:22).

La Mishna et le Talmud

• La Mishna Nedarim prévoit des procédures d’annulation de vœux individuels.

• La Guemara (Nedarim 23b, 77b) enseigne qu’une personne qui regrette son vœu peut s’adresser à un Sage ou à un Beit Din de trois personnes pour demander une Hatarat Nedarim (annulation conditionnelle).

• Le Talmud mentionne même une coutume de se rétracter solennellement à Roch Hachana.

Kol Nidré s’inscrit dans cette logique : il reprend publiquement ce mécanisme d’annulation, au seuil du jour du Jugement.

Un moment de ferveur

Si Kol Nidré a survécu à toutes les critiques, c’est aussi grâce à la force de sa mélodie poignante.
C’est ce chant qui marque profondément les fidèles, au point que, pour beaucoup, Kol Nidré est devenu le symbole même de Yom Kippour.

Sens spirituel

Kol Nidré ne se réduit pas à un rituel juridique :

• Il exprime l’angoisse de l’homme devant la gravité de ses paroles.

• Il nous rappelle que l’on ne doit pas promettre à la légère.

• Il ouvre Yom Kippour en plaçant chacun devant l’idée de pureté verbale et morale, pour que notre prière de ce jour soit entière et sincère.